Mon itinérêve, mon village, ma vie…
Arrivés de toute part de bon matin, de baskets chaussés, jogging, chapeaux, bâtons en mains, sacs à dos, voilà les randonneurs.
Jeunes, jeunes d’antan désireux d’air pur, de beaux paysages, de patrimoine, d’historique de légendes, de quelques airs reflétant le vécu, accompagnés par ce petit guide du jour avec toute sa passion qui l’anime.
Nous prenons le chemin des écoliers en passant entre deux étangs ; « les étangs du moulin ». On monte « la charrière », à une fourche on aperçoit le village: cinq maisons à tours carrées en granit, couvertes de lauze, coiffés d’une croix en pierre et d’une boule de faîtage. Deux des tours ont, dans leurs battis des moellons semblables à ceux des temples gallo-romains. Près du four du village de Gramond, il y a la maison qui a été habitée par le conte Ithier de Gramond en 1402, tout près au bout du petit « courijou », la fontaine à la vierge noire en pierre basaltique du Cantal. On peut voir un corps de bâtiments magnifiquement restaurés par une famille amoureuse de la pierre. Cela aurait été une commanderie au temps des templiers. Le linteau ainsi que des croix de propriété de chemins (croix au cœur à l’envers), en témoigne. Chaque ferme possède un puits. Au moyen âge, ce village aurait abrité une léproserie. Bourgeois et religieux ont donné des soins aux malades. En fin de vie, ils étaient «parqués» dans un bois, dans les gorges de la Dordogne : « le bois des lépreux », où nous accédons par un sentier pentu. L’emplacement du portail avec sa pierre percée et entouré de murs, en bas de ce terrain, aurait pu être le four qui leur permettait de préparer leurs repas.
Imaginons la végétation de l’époque, exposition plein sud: ces pentes étaient cultivées par des brassiers.. Une vue magnifique sur la rivière Dordogne qui, plus tard, se voulait marchande au temps des gabarriers.
Leurs chants montent doucement dans le groupe.
La Dordogne est classée à l’UNESCO en 2012 pour sa biosphère. On marche sur la «charaoue», sentier bordé de murs bien conservés sur un tapis de feuilles qui crissent sous nos pas. Les terpènes, sans le savoir, nous serons bénéfiques. L’odeur timide de la forêt nous ravie. Apparaît «le bourna» . Quatre générations se sont occupées des abeilles pour recueillir ce précieux nectar. Nous voyons la boutique où se repose une roue de moulin. Elle a servi, dans les années 2000 à baguée Therèze (aigle botte). Sa migration vers le Niger a passionné les gens du village en 2009.
Nous continuons la ballade : une grande maison logeait les jeunes incorporés aux chantiers de jeunesse sous Petain en 1940 (appelé grenier du maquis), nous voyons un four tout en pierre du village de Laval face à un très beau corps de ferme, puis trois bacs de pierres servant à alimenter en eau de fontaine, et enfin le bétail du village. Un bel ensemble de bâtiments au bout du «roc du chon». Un peu plus haut, le village de Laplaze (quatre fermettes) nous offre une belle croix de propriété, son four d’où part un petit «courijou». Celui-ci conduit à la fontaine où les femmes du village puisaient leur eau précieuse, matin et soir. Des dalles usées, datant du moyen âge, reliaient sans doute à la voix romaine menant à l’église du bourg. A la fontaine, les randonneurs reprennent le chant des grives au loup pour ressentir le passé.
Nous quittons ce petit coin de France où le bonheur fleuri. Sur le chemin du retour, nous verrons les quatre piliers qui supportaient le pylône du téléphérique amenant le ciment pendant la construction du barrage du Chastang (dans les années 1950). Ce voyage en terre sainte, nous a fait voyager dans le temps en admirant le travail des hommes, le cœur léger sur une petite portion du magnifique tracé de villages en barrages.
Marie-Claire BOURRIN